Quoi ? Des Jamaïcains qui participent aux Jeux Olympiques d’hiver en bobsleigh ? C’est une blague ? Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, c’est tout à fait vrai. Rasta rockett (oui, avec 2 t à la fin) raconte l’histoire de ces 4 jamaïcains qui ont concouru pour les Jeux Olympiques de Calgary, en 1988.
Oui, 4 jamaïcains ont bien participé, mais l’histoire a été (très) largement remaniée, 80, voir 90% du film étant inventé et différent de l’histoire vraie, mais on y reviendra plus tard.
Nous sommes en 1987. Derice Bannock (Leon) est un sprinter et s’entraîne d’arrache-pied pour réaliser son rêve : participer aux Jeux Olympiques de Séoul 1988. Le jour des sélections pour la participation aux Jeux Olympiques du 100 mètres, alors que Derice fait partie des favoris, pendant la course, Junior Bevil (Rawle D. Lewis) trébuche et entraîne dans sa chute Derice et Yul Brenner (Malik Yoba).
Derice tente sans succès auprès du chef des sports jamaïcains de faire recourir la course. C’est là qu’il aperçoit une vieille photo où son père (un ancien sprinter, médaillé) pose à coté d’un homme avec une médaille. Le chef des sports lui dit qu’il s’agit d’Irvin Blitzer (John Candy), un ancien champion olympique de bobsleigh.
Irvin avait tenté de convaincre le père de Derice de changer de discipline, car il avait une théorie qui consistait à utiliser 3 sprinters pour pousser le bobsleigh comme coéquipiers. Selon lui, cela favorisait le démarrage et la vitesse de pointe.
Après s’être renseigné sur ce qu’est un bobsleigh et convaincu son meilleur ami, Sanka (Doug E. Doug) d’être le pilote (il est champion de push-car, les caisses à savon locales), ils doivent convaincre Irvin Blitzer d’être leur entraineur.
Ce dernier s’est installé en Jamaïque, où il vivote comme bookmaker pour des paris sportifs dans un bar. Après de nombreux refus, Derice finit par convaincre Irvin de devenir leur entraîneur pour les JO. Il leur faut encore 2 autres coéquipiers.
Ils organisent une « réunion » pour trouver les 2 membres restants, mais tous quittent la salle devant le danger du sport, à l’exception de Yul Brenner et Junior Bevil (les 2 autres sprinters qui ont chuté). L’équipe de bobsleigh de la Jamaïque est formée. Et après un entraînement laborieux avec les moyens du bord, ils réussissent à faire un temps acceptable.
Reste le financement. Devant le refus de la fédération du sport et de nombreuses compagnies pour les sponsoriser, ils organisent une collecte via diverses opérations (« baisers » payants, chanson,…), ils réunissent les fonds nécessaires. Et ils embarquent, direction Calgary pour les Jeux Olympiques d’hiver 1988 (jusqu’en 1992, les JO d’hiver et d’été avaient lieu la même année ; depuis Lillehammer en 1994, JO d’été et d’hiver ont un décalage de 2 ans).
Je n’en dirais pas plus, le reste du film se déroulant à Calgary. Bien d’autres péripéties les attendent, le tout avec beaucoup d’humour.
26 ans après sa sortie, le film a vraiment bien vieilli, les gags font toujours mouche, les personnages sont très attachants et il y a un coté « feel good » qui se dégage du film, avec un esprit jamaïcain (yeah man !) et une bonne humeur communicative.
Le film est plus profond qu’il n’en a l’air, ce n’est pas uniquement une comédie. Le film parle aussi d’amitié, de dignité ou qu’avec de la volonté, tout est possible. Y compris pour les personnages, comme par exemple Derice, qui veut tout faire comme les Suisses (qui gagnèrent l’or cette année là), avant de se rendre compte qu’il doit être lui-même pour s’affirmer, Yul qui veut fuir la misère ou Irvin, qui veut retrouver son honneur.
Pour la réalisation, c’est Jon Turteltaub qui est aux manettes. Peut-être es-ce le fait que c’est un cinéaste touche à tout (sa filmographie comporte des comédies, des drames, des comédies romantiques, des films d’aventure,…), mais sa réalisation est assez variée et nuancée. Déjà, l’ambiance entre la Jamaïque et Calgary est radicalement différente, mais il y a un montage et des plans dynamiques quand il le faut (les scènes de bob sont très réussies), des plages plus calmes et intimistes pour les moments émouvants, etc…
Pour la musique, même si c’est Hans Zimmer qui s’y colle, il y a plusieurs morceaux de reggae, dont le tube « I can see clearly now » de Jimmy Cliff. Comme on s’en doute, elle colle parfaitement avec le film.
Concernant les acteurs, ils sont tous bien typés et attachants, avec Derice qui veut suivre les traces de son père, Sanka le comique de la troupe, Yul le « dur » qui veut quitter la Jamaïque et Junior, le fils à papa qui cherche à s’émanciper. Aucun ne réussi réellement à percer après le film, même Leon, qui hormis un rôle de méchant dans Cliffhanger sorti la même année, n’eut plus de rôle particulièrement marquant.
Ce sera aussi malheureusement le dernier film de John Candy sorti de son vivant. Souffrant de problèmes cardiaques, il s’était repris en main en maigrissant et arrêtant de fumer. Malheureusement, ce ne fut pas suffisant et mourut d’une crise cardiaque à 43 ans, comme son père et son grand-père, pour les mêmes raisons. Par contre, dans le film, John Candy est très bon en entraîneur blasé, mais attaché à ses poulains et cherchant à se racheter de ses erreurs passées.
Pour les points négatifs, il n’y en a pas tant que ça. Peut-être 2 scènes « moralisatrices » typiquement américaines, qui heureusement, n’ont pas tant d’impact sur l’histoire. Même si le film est une très bonne comédie et qu’on peut le prendre comme tel, on peut regretter que le film prenne de grandes libertés avec l’histoire originelle.
En réalité, ce sont 2 hommes d’affaires américains qui, en voyant une course de push-cars, ont eu l’idée saugrenue de faire une équipe de bobsleigh jamaïquaine. Ils sélectionnent 4 sportifs de haut niveau travaillant dans l’armée, celui dirigeant le bob était pilote d’hélicoptère !
Ils ont financé leur voyage à Calgary en vendant des T-shirts, et Irvin Blitzer n’a jamais existé, ils avaient 3 entraineurs à leurs cotés. Et contrairement au film, ils ont également participé au bob à 2. Quant au fameux moment émouvant (qui tire des larmes à pas mal de monde), cela eu bien lieu, mais de manière moins « épique » que dans le film.
Ensuite, ils ont participé à 4 Jeux Olympiques, Calgary (1988), Albertville (1992), Lillehammer (1994) et Nagano (1998), leur meilleur résultat étant une 14e place lors des JO de Lillehammer.
Et concernant d’autres jamaïcains en bobsleigh, il y aura une autre équipe en 2002 à Salt Lake city, puis il faudra attendre 2014 (Sotchi) et 2018 (Pyongyang) pour revoir des jamaïcains en bobsleigh. Fait amusant : pour 2014 et 2018, ils ont financé leur participation aux JO via kickstarter.
Bon, ce n’est pas un défaut, mais dans Rasta rockett, on redécouvre avec horreur les goûts vestimentaires plus que douteux des années 80. Pour ceux qui s’en souviennent, c’était un festival de couleurs, si possible fluo ou bien flashy, qui font limite paraître comme sobre les vêtements les plus bariolés de Desigual.
Pour conclure, on peut pester sur le film qui prend de grandes libertés avec l’histoire vraie, mais si l’on prend le film pour ce qu’il est, Rasta rockett est une très bonne comédie « feel-good » des années 90, très drôle, avec des personnages attachants et un film plus profond qu’il n’y paraît.
Il n’a pas pris une ride, on ne s’ennuie pas une seconde et comme dirait l’équipe avant de s’élancer, « Balance man, cadence man, et rase la glace, c’est le bob man ! ». Une très bonne comédie pour toute la famille, que je conseille vivement et qui est fréquemment rediffusée !
Hidalgo
Extraits vidéo :
Rasta rockett
Sortie: 1993
Durée: 98 minutes
Genre: Comédie / Histoire vraie
Pays: USA
Réalisation : Jon Turteltaub
Production : Dawn Steel, Susan B. Landau, Jeffrey Bydalek
Distribution : Walt Disney Pictures (anciennement Buena Vista Distribution Company)
Scénario : Lynn Siefert, Tommy Swerdlow et Michael Goldberg
Musique : Hans Zimmer
Acteurs principaux: Leon (Derice Bannock), John Candy (Irving Blitzer), Doug E. Doug (Sanka Coffie), Malik Yoba (Yul Brenner), Rawle D. Lewis (Junior Bevil)
Budget : 15’000’000 $
Recettes mondiales: 154’856’263 $