Pour célébrer dignement la 100e chronique de cinemaster, j’ai décidé de chroniquer un film très important pour moi, un film culte qui tient du chef d’œuvre et qui est bien trop souvent sous-estimé, Rocky. Le premier Rocky est dans mon top 5 de mes films préférés, et la saga des Rocky également (avec les trilogies Le seigneur des anneaux et Retour vers le futur).
Bien souvent, les gens qui n’ont pas vu Rocky considèrent la saga des Rocky comme des films d’action pour les beaufs, décérébrés, avec de mauvais acteurs, qui ont comme sujet un sport de brutes ne proposant rien d’intéressant. En plus, comme le premier volet a plus de 40 ans, ça ne vaut pas le coup.
Quelle erreur !!! J’ai réussi à convaincre des personnes réticentes à la base de le regarder, et autant dire qu’elles ont eu une très belle surprise. Elles ont très vite changé d’avis et regretté leurs à priori. Car, hormis peut-être Rocky 4 (1985), la saga des films Rocky (6 Rocky et 2 Creed) sont des films d’auteur, qui donnent parmi les meilleures leçons de vie de l’histoire du cinéma !
Et qui prouve qu’on peut faire des films avec un message fort sans être chiants ! Pour ceux qui espèrent me voir casser du sucre sur Stallone ou Rocky, vous pouvez arrêter de lire la chronique ici, ce ne sera pas le cas.
Novembre 1975, Rocky Balboa (Sylvester Stallone) dispute un match de boxe dans un club minable de Philadelphie contre Spider Ricko (Pedro Lovell). Rocky gagne le match et… 40 dollars ! Etant un boxeur de deuxième zone, ses combats ne lui permettent pas d’en vivre, et il travaille pour Tony Gazzo (Joe Spinell), un usurier. Son rôle consiste à soutirer l’argent des débiteurs, quitte à user de la force.
Le lendemain, lorsqu’il se rend à son club de boxe, il remarque que son casier a été donné à un boxeur jugé plus talentueux selon Mickey (Burgless Meredith), le propriétaire. Vexé, il se rend (comme pratiquement tous les jours) dans un magasin d’animaux domestiques où travaille Adrian (Talia Shire), une femme d’une timidité maladive et mal dans sa peau qui se cache derrière des lunettes disgracieuses.
Rocky essaie de se rapprocher d’elle en inventant des blagues (très mauvaises) et Paulie (Burt Young), le frère d’Adrian, l’encourage à sortir avec elle. Paulie est un gars constamment de mauvaise humeur, mais c’est aussi le meilleur ami de Rocky.
Parallèlement à cela, Apollo Creed (Carl Weathers) annonce qu’il va remettre en jeu son titre de champion du monde des poids lourds le 1er janvier 1976, pour coïncider avec le bicentenaire des Etats-Unis. A Thanksgiving, Rocky est invité par Paulie pour manger la dinde. Paulie se montre désagréable (voir méchant) avec Adrian, voulant qu’elle sorte avec Rocky.
Rassurée par les propos de Rocky, elle se décide enfin à lui « donner une chance », en allant faire du patin à glace. Pendant cette scène (une des meilleures pour les dialogues), ils apprennent à mieux se connaître et se rapprochent. Ils iront dans l’appartement délabré de Rocky et ce dernier, décelant chez Adrian ce que personne d’autre n’avait vu, comprend que les sentiments que Rocky a pour elle sont sincères et leur histoire débute.
Pour Apollo Creed, c’est la catastrophe, son adversaire pour le titre s’est blessé. Personne ne veut se mesurer au champion dans un délai si court (5 semaines). Apollo a donc l’idée de donner sa chance à un boxeur de seconde zone et porte son choix sur Rocky grâce à son surnom, l’Etalon Italien.
En businessman avisé, il sait que cela plaira aux médias. Rocky le loubard se voit offrir la chance de concourir pour le titre de champion du monde des poids lourds.
Alors que Gazzo donne 500 dollars à Rocky pour son entraînement (sans devoir travailler pour lui), Mickey, qui avait dénigré Rocky jusqu’à présent, va le voir.
Il désire devenir son manager, pour l’entraîner et lui éviter toutes les vacheries dont il a du faire face dans sa carrière. Après un entretien houleux (là aussi un grand moment), Rocky accepte que Mickey le prenne sous son aile et de le préparer avant le combat, qui aura lieu dans quelques semaines…
Je ne vais pas en dire plus concernant l’histoire, désirant laisser la surprise à ceux qui ne l’ont pas vu et qui ne connaissent pas ce pur chef d’œuvre du cinéma. Mais comment ce film a vu le jour ?
A l’époque, Sylvester Stallone est un inconnu, cachetonnant comme figurant ou second rôle. Un soir, il va voir un match de boxe entre Mohammed Ali et Chuck Wepner. Chuck Wepner, un boxeur prétendu nul, va tenir 15 rounds contre Ali et même l’envoyer au tapis à une reprise ! Pour Stallone, c’est la révélation!
Pendant 3 jours, prenant des pilules de caféine pour tenir le coup, il écrit frénétiquement sans discontinuer le script de Rocky. Sa femme le lit, mais trouve le récit beaucoup trop noir. Stallone va réécrire le script plusieurs fois jusqu’à lui donner l’aspect qu’on lui connait (seuls 10% du script originel sont dans le film).
Il propose son script à Chartoff et Winkler, qui se montrent très intéressés. Mais Stallone a une condition : il refuse de vendre le script s’il n’incarne pas Rocky. Ils finiront par céder, mais le film aura un budget très modeste.
Stallone devait avoir une foi inébranlable en Rocky pour résister à la tentation de vendre son script, car à l’époque, il était tellement pauvre qu’il a du vendre son chien pour s’acheter à manger (il rachètera Butkus dès qu’il aura son cachet de scénariste en poche).
Tourné en 28 jours avec un budget famélique de 960’000 $, Rocky triomphe au box office, devenant le plus gros succès de 1976 avec 225 millions de dollars amassés ! Le film gagne plus de 30 prix ou nominations. Stallone sera nominé comme meilleur acteur et meilleur scénario, et le film repartira avec les Oscars de meilleur film, réalisateur et montage. 6 mois plus tôt, Stallone galérait pour trouver un petit rôle. Rocky le révèle au monde entier.
Il m’est très difficile de juger Rocky, tant ce film représente pour moi. C’est plus qu’un film. Comme nous tous, j’ai eu des coups durs dans ma vie, des galères avec mon moral au plus bas. La saga Rocky a été comme un électrochoc. Le message du film, son éthique, ses symboles, ses valeurs, la force des dialogues ont de quoi pousser n’importe qui à se relever !
Le film regorge de bons conseils pour ceux qui cherchent à donner un sens à leur vie et à se dépasser dans leur domaine. Et encore de nos jours, quand cela va mal, si je regarde un Rocky, je me sens mieux.
Déjà, coup de maître pour l’histoire et le scénario ! Il est intelligent, extrêmement bien abouti, avec beaucoup d’humanité et une réelle portée dramatique et sociale. Beaucoup de personnes l’oublient, mais Rocky est un drame se déroulant dans le milieu de la boxe. Ce n’est pas un film d’action, ni un film sportif.
Il n’y a que 2 combats de boxe, au tout début et à la fin, pour une durée d’environ 12 minutes. Même si le combat entre Rocky et Apollo est intense et palpitant, cela fait peu, pour un film qui dure près de 2 heures.
Le film s’intéresse plus sur Rocky, les personnages gravitant autour de lui et la vie dans les quartiers pauvres de Philadelphie que sur la boxe. Je dirais même que le cœur du film, c’est la relation entre Rocky et Adrian.
Beaucoup disent que Rocky est le symbole du rêve américain, qui veut qu’on peut arriver à tout à force de travail et de volonté. C’est vrai, mais Rocky symbolise également la revanche de la classe ouvrière (et des laissés-pour-compte) qu’on dénigre et rabaisse.
Les Rocky se concentrent bien plus sur les discours et les scènes d’émotions fortes que sur les combats, et qu’ils parlent bien plus des combats de la vie que des affrontements physiques.
Néanmoins, les séances d’entraînement et les combats de chaque film ont toujours bénéficié d’un soin tout particulier. Même si l’on a privilégié le spectaculaire au réalisme, les combats ont toujours été très intenses, violents, accrocheurs, impressionnants et même émouvants (oui !).
Tous les personnages du film sont très attachants et très bien écrits, à commencer, bien sûr par Rocky. C’est un personnage simple, voir simplet. Il écrit mal et ne lit pas très bien.
Mais c’est aussi un personnage incroyablement humain, fort, attachant, qui est l’incarnation du bon gars. Il n’y a qu’à voir comment il traite Adrian ou lorsqu’il ramène la petite Marie.
Il est honnête et, surtout une des caractéristiques du personnage, il a de l’honneur ! Son objectif, dans l’épique match qui l’oppose à Apollo Creed, c’est de ne pas perdre la face, et prouver que ce n’est pas un minable comme les autres.
Et bon, beaucoup de monde le sait, mais Rocky, c’est l’alter ego de Stallone, celui qu’il souhaiterait être ! A l’époque où il a écrit le script, sa vie n’était pas très différente de celle de Rocky. C’est probablement une des raisons pour laquelle son interprétation de Rocky est magistrale, émouvante et sonne « juste ».
Quant aux autres acteurs, ils sont tous formidables. Carl Weathers est épatant en Apollo Creed. Ce boxeur charismatique et fier est un showman (voir son numéro en arrivant le ring !) mais dès qu’il est sur le ring, il est redoutable. Il est totalement crédible, tant comme acteur que boxeur, avec une carrure impressionnante.
Talia Shire aussi, très touchante en une Adrian d’une timidité maladive qui va peu à peu s’ouvrir et tenir tête au teigneux Paulie, que Burt Young magnifie. Et que dire de Burgless Meredith, impressionnant en vieil homme aigri par la vie, qui à enfin un but dans la vie ? Tout ressort par sa voix (vo et vf) ! Même Joe Spinell, qui même si il a un petit rôle en Gazzo, est très humain. Il a beau être usurier, il n’est pas foncièrement mauvais et aime bien Rocky.
Les personnages du film sont magnifiés par les dialogues, qui dans chaque Rocky (à part peut-être le 4), nous gratifient de plusieurs passages puissants et touchants. Je vais prendre en exemple le dialogue du premier volet entre Mickey et Rocky, quand ce dernier lui demande pourquoi il lui en veut :
Rocky : Ecoute, ça fait 6 ans que je viens, ça fait 6 ans que tu me fais la gueule, je veux savoir pourquoi ! (…)
Mickey : T’avais l’étoffe pour devenir un vrai boxeur. Mais, au lieu d’en vouloir, tu préfères faire les basses besognes pour un usurier minable, une sangsue !
Rocky : Je gagne ma vie !
Mickey : Non, tu la gâches !
Pour la réalisation, malgré son budget très serré, John G. Avildsen reçu l’Oscar du meilleur réalisateur. Ce n’est pas pour rien ! La réalisation n’a pas pris une ride, et le film regorge de scènes cultes : plan-séquence de Rocky buvant 5 œufs crus (on croyait que c’était bon à l’époque), Rocky frappant des carcasses de viande, lorsque Rocky raccompagne Marie, la séquence de patin à glace, les séquences d’entraînement ou le fantastique combat de boxe contre Apollo Creed.
Pour l’anecdote, les 2 scènes où Rocky monte les marches du Philadelphia Museum of Art, une si ce n’est LA scène la plus culte du film, c’était la première fois qu’on utilisait le steadycam. Cela permet d’avoir des mouvements fluides lors de la montée des marches (surtout visibles lors de la première montée, où il finit sur les rotules).
Pour terminer, un mot sur la BO de Bill Conti. Elle est tout simplement mythique, elle magnifie le film et je suis persuadé que la majorité de ceux qui n’ont jamais vu le film la connaisse. Qu’elle soit épique ou émouvante, elle est juste parfaite !
Je vais m’arrêter là, la chronique étant déjà bien assez longue, mais vous m’aurez compris, Rocky est un véritable chef d’œuvre ! Que ce soit l’histoire, le scénario, les dialogues, les acteurs, les messages, les scènes émouvantes ou cultes et la BO mythique, tout est parfait dans ce film.
Porté à bout de bras par un Sylvester Stallone en état de grâce, Rocky deviendra une icône, le symbole de la revanche de la classe ouvrière et qui donne parmi les meilleures leçons de vie de l’histoire du cinéma ! Un chef d’œuvre, tout simplement, à voir ou revoir sans modération !
Hidalgo
Extraits vidéo :
Rocky
Sortie: 1976
Durée: 119 minutes
Genre: Drame
Pays: USA
Réalisation: John G. Avildsen
Production: Irwin Winkler, Robert Chartoff
Distribution: United Artists (puis MGM)
Scénario: Sylvester Stallone
Musique: Bill Conti
Acteurs principaux: Sylvester Stallone (Rocky Balboa), Talia Shire (Adrian Pennino), Burt Young (Paulie Pennino), Carl Weathers (Apollo Creed), Burgless Meredith (Mickey Goldmill), Joe Spinell (Tony Gazzo)
Budget: 960’000’ $
Recettes: 225’000’000 $
Récompenses :
Plus d’une trentaine de prix ou nominations dans divers festivals. Les principaux :
Oscars 1977
Meilleur film
Meilleur réalisateur
Meilleur montage
Golden globes 1977
Meilleur film
Kansas City Film Critics Circle Awards 1976
Meilleur acteur
Meilleur film