Quoi de mieux qu’un film de Russ Meyer pour la première chronique d’un film érotique? Pour ceux qui ne connaissent pas Russ Meyer, une petite présentation s’impose avant de parler du film Vixen.
Russ Meyer était un cinéaste « provocateur », qui aimait choquer l’Amérique puritaine des années 60 et 70. Toutes les valeurs concernant la famille, le mariage, l’armée, la religion et autres idées bien pensantes en prennent pour leur grade. Mais il était surtout connu pour avoir des actrices avec des poitrines démesurées (et naturelles), rarement en-dessous d’un bonnet D !
Dans ses films, les femmes sont souvent des femmes fortes, émancipées (nymphomanes) et agressives et les hommes des abrutis libidineux rabaissant les femmes. Les scénarios sont souvent sans queue ni tête (voir à chier), avec des scènes WTF, un style cartoonesque et, parfois, des scènes très violentes.
Mais il avait également un certain talent pour mettre en scène ses films fauchés dans un monde rural, en multipliant des montages inattendus, des plans en contre-plongées et profondeurs de champs et, surtout, mettant en valeur ses héroïnes, plus particulièrement leurs généreuses poitrines !
Ayant commencé comme photographe de guerre, il se spécialisera par la suite dans les photos de pin-ups et vendra même certains clichés à Playboy. Après quelques nudies, il tournera en 1965 2 thrillers sexy et violents, Motorpsycho et peut-être son film le plus connu, Faster, pussycat ! Kill ! Kill !.
En 1966, c’est la fin du code de censure Hays, dès lors, on peut montrer de la nudité à l’écran et Russ Meyer ne s’en prive pas en sortant Mondo Topless, un pseudo-documentaire à base de nombreux strip-teases. Puis, après quelques films érotiques, il nous présente en 1968 sa quadrilogie des « vixen » avec Vixen (1968), Supervixens (1975), Mega vixens (Up !) (1976) et Ultra vixens (1979).
Après 22 ans d’absence avant tout consacrés à l’écriture, il réalise en 2001 Pandora Peaks, un documentaire sur le modèle et actrice érotique du même nom, et s’éteindra en 2004.
Voilà, maintenant, attaquons-nous à Vixen, qui est le premier film de la quadrilogie des « vixen ». Disons-le d’emblée, c’est le moi bon des quatre volets, le moins « fou » également, mais il y a tout de même un coté engagé et contestataire sur le racisme, l’inceste ou la politique (capitalisme versus communisme).
Vixen, appelée Renarde dans le film (Erica Gavin) vit au Canada près de la frontière avec les Etats-Unis. Elle est mariée à Tom (Garth Pillsbury), un aviateur. Mais Renarde, n’est pas vraiment du genre fidèle et Tom ne lui suffisant pas, elle n’hésite pas à le tromper dès que celui-ci est en déplacement ou a le dos tourné. Après avoir fait l’amour dans les prés avec un agent de police, Renarde rentre juste avant que Tom arrive avec un couple de touristes, Dave (Robert Aiken) et Janet (Jon Evans).
Lors d’une partie de pêche, Renarde et Dave s’éloignent et en profitent pour faire l’amour dans la rivière (une constante dans les films de Russ Meyer). Plus tard dans la soirée, Renarde fera l’amour avec Janet, profitant que cette dernière est ivre et que Tom et Dave sont partis chasser.
Et enfin, après l’avoir allumé pendant presque tout le film, Renarde ira jusqu’à faire l’amour avec Judd, son propre frère ! Si on compte Tom, avec qui elle couche 2 fois, cela fait un total de 6 en moins d’une heure.
Il n’y a qu’avec Niles (Harrison Page), le meilleur ami de Judd que Renarde ne couchera pas. La raison, c’est que Niles est noir et Renarde est profondément raciste, n’hésitant pas à le rabaisser ou lui parler très crûment.
Le dernier quart du film est assez différent. Un écossais, O’Bannion (Michael Donnovan O’Donnell) engage Tom pour l’emmener aux Etats-Unis. Voyant le mépris qu’à Renarde pour Niles, et sachant que Niles a fui les Etats-Unis pour éviter de servir au Vietnam, O’Donnell lui explique son plan.
En fait, O’Donnell est communiste, et une fois en vol, il va prendre Tom en otage pour l’emmener à Cuba. Niles, convaincu que les noirs sont mieux traités à Cuba se joint à lui et Renarde, désirant être avec son mari, les accompagne.
En vol, O’Bannon prend Tom en otage. S’ensuit un discours politique entre régime démocratique et communiste. Après de nombreuses minutes, Niles n’est plus convaincu d’aller à Cuba, il assomme O’Bannon, l’avion se pose au Etats-Unis, Niles s’enfuit (refusant de combattre au Vietnam) et O’Bannon incarcéré. Tom et Renarde rentrent chez eux accueillir de nouveaux touristes, et le film se termine sur le sourire malicieux de Renarde.
Vixen est un film assez particulier, dans le sens où l’on a un film érotique d’un coté, et d’un autre, un film engagé et politique, dénonçant la guerre du Vietnam, l’affrontement ouest-est et le racisme. Les 2 parties sont clairement séparées, et non imbriquées tout le long du film.
Lors de sa sortie, le film provoqua un scandale, concernant le coté amoral de Vixen, ne respectant pas les valeurs du mariage et surtout l’inceste avec son propre frère. On critiqua également le fait que Niles fui les Etats-Unis pour ne pas servir au Vietnam, mais le racisme de Vixen ne choqua personne. No comment. Néanmoins, le scandale participa au succès du film, car tourné avec seulement 72’000 dollars, il rapporta 15 millions !
En regardant le film en 2019, si l’on peut saluer le coté engagé du film, la partie érotique est beaucoup moins intéressante. C’est extrêmement kitch et on ne retrouve pas le coté « dingue » ou cartoonesque des 3 autres vixen.
Juste pour vous donner une idée, dans les 3 autres « vixen », on retrouve par exemple des bruitages délirants dignes de cartoons, un éboueur sodomite, une bonne sœur nymphomane où, mon préféré, un sosie d’Hitler qui se fera dévorer par des piranhas sur fond de musique militaire allemande !
Enfin, et c’est plutôt étonnant, Erica Gavin et Vincene Wallace n’ont toutes les 2 qu’un « modeste » bonnet C. A ma connaissance, ce sont 2 des 3 actrices les moins « généreuses » de toute la filmographie de Russ Meyer! Puisque l’on parle des actrices, il faut avouer qu’Erica Gavin porte le film sur ses épaules et incarne parfaitement le personnage de Vixen.
Elle dégage un coté « grosse cochonne » qui va parfaitement à son personnage amoral (ses sourcils étaient redessinés pour accentuer l’effet). Elle est moins convaincante comme raciste, mais elle avoua par la suite que cela fut très difficile pour elle à jouer, au vu de ses valeurs.
Pour le reste, même si le film ne dure que 75 minutes, il y a quelques longueurs dans le film. On a aussi de temps en temps des montages inattendus, accolant 2 scènes n’ayant aucun rapport l’une avec l’autre. Et pour les scènes, WTF, que dire de la scène du poisson ? C’est sensé être sexy et exitant, mais c’est complètement raté (voir l’extrait plus bas).
Quant à la musique, elle n’est absolument pas en accord avec le film, sorte de musique d’ambiance légèrement jazzy digne des années 60. Regardez les 2 extraits vidéos après la chronique pour comprendre. Et pour la réalisation, Russ Meyer arrivait très souvent à masquer le fait qu’il avait un très petit budget pour ses films, mais ce n’est pas le cas ici, on sent clairement le bricolage.
Comme vous l’aurez compris, ce film ne vaut que pour la prestation d’Erica Gavin, vraiment épatante, et pour son coté engagé et contestataire. Pour ceux intéressés uniquement par le coté érotique, je ne conseille pas Vixen, Russ Meyer ayant fait bien mieux. Allez, 2 étoiles pour le coté novateur et provocant lors de sa sortie, et d’avoir fait un film engagé sous couvert d’un film érotique kitch.
Hidalgo
Extraits vidéos :
Vixen
Sortie: 1968
Durée: 75 minutes
Genre: érotique
Pays: USA
Réalisation : Russ Meyer
Production : Russ Meyer
Distribution : Eve Productions
Scénario : Robert Rudelson, d’après une histoire de Russ Meyer et Anthony James Ryan
Musique : Igo Kantor
Acteurs principaux: Erica Gavin (Vixen), Garth Pillsbury (Tom), Harrison Page (Niles), Jon Evans (Judd), Vincene Wallace (Janet King)
Budget : 72’000 $
Recettes mondiales: 15’000’000 $