Rush (2013) * * * * * *

Tout comme Rocky n’est pas un film sur la boxe, Rush n’est pas un film sur la Formule 1. C’est le contexte du film, les événements se passent dans ce milieu, mais ce n’est pas le sujet, c’est un biopic sur James Hunt et Niki Lauda et leur rivalité, principalement lors du championnat du monde 1976 de Formule 1. La grande force de ce film, c’est que même des personnes réfractaires à la Formule 1 que je connais ont adoré le film ! Mais avant de parler de toutes ces qualités, retour sur le pitch et cette incroyable histoire vraie.

 

Quand on parle de Formule 1 et de rivalité, on pense immédiatement à Ayrton Senna et Alain Prost ! Néanmoins, celle de James Hunt et Niki Lauda est également entrée dans la légende pour plusieurs raisons, et sans le coté aussi haineux qu’il pouvait y avoir entre Senna et Prost.

 

Nous sommes au début des années 70, dans le championnat de Formule 3 en Grande-Bretagne. Un nouveau pilote, le prometteur Niki Lauda (Daniel Brühl), est inscrit. Durant la course James Hunt (Chris Hemsworth) et Niki Lauda sont au coude à coude, mais Hunt tente un dépassement audacieux, ils se touchent, Lauda part en tête à queue et doit abandonner, alors que Hunt gagne la course.

 

Après la course, Lauda est furieux contre Hunt et sa manœuvre dangereuse pendant que Hunt traite Lauda de poule mouillé. Autant dire qu’ils ne s’apprécient pas, d’autant plus que leurs personnalités sont très différentes.

 

Oui, le vrai James Hunt portait un patch « Sex is breakfast of champions »

James Hunt est probablement le seul pilote de F1 qui se comportait comme une rockstar. Charismatique, beau-gosse, extraverti, multipliant les conquêtes féminines (on estime qu’il aurait couché entre 3000 et 5000 femmes !!!), gros fêtard, n’hésitant pas à conduire saoul, fumeur (et pas que de cigarettes) et prêt à prendre tous les risques pour gagner. Il brûlait la vie par les 2 bouts, mais était sympa et populaire auprès des autres pilotes.

 

 

 

 

 

 

 

 

De l’autre coté, Niki Lauda est presque son opposé. Très professionnel et sérieux, il n’hésitait pas à arpenter les circuits à pied pour les analyser avant la course. Il se couchait tôt, fuyait les mondanités, c’était un excellent metteur au point, passant des heures avec ses mécaniciens pour tirer le meilleur de sa monoplace. Mais son coté arrogant et introverti ne le rendaient pas très populaire et lui valurent les surnoms « l’ordinateur » ou, pire, « le rat ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les rapports entre Niki et Klay étaient meilleurs que ceux qui sont dépeints dans le film

Bref, quelques années plus tard, en 1973, Lauda et Hunt se retrouvent en Formule 1, Lauda pilotant dans la modeste écurie BRM au coté du pilote suisse Clay Regazzoni (Pierfrancesco Favino), en achetant sa place (il fût l’un des premiers à le faire alors que c’est monnaie courante de nos jours). Quant à James Hunt, il pilote pour Hesketh, l’écurie d’un noble excentrique et oisif qu’il côtoie depuis qu’il pilotait en formule 3.

 

Mais c’est en 1976 que le véritable affrontement arrive. Lauda conduit pour Ferrari et à eu le titre en 1975 et Hunt, grâce à un coup de pouce du destin, est engagé par McLaren. Ayant chacun une voiture performante, l’affrontement sera épique… et tragique.

 

Bref, la saison commence et comme en 1975, Niki Lauda survole les débats, accumulant les bons résultats, pendant que Hunt se débat avec des problèmes de fiabilité. Néanmoins, après quelques courses, Hunt commence à engranger des bons résultats et gagne 2 Grands Prix. Lauda a encore 26 points d’avance sur le second, mais Hunt est dans une phase ascendante et est 3e du championnat.

 

 

Le tournant du film a lieu lors du tragique Grand-Prix du Nürburgring le 1er août 1976, en Allemagne. De nos jours, le Grand Prix se déroule sur une portion du circuit et une autre aménagée spécialement, pour une longueur de 5,148 km. Mais en 1976, le Grand-Prix avait lieu sur la totalité du circuit de la Nordschleife, soit 22,8 km ! Il est toujours considéré comme le circuit le plus sélectif et dangereux, les amateurs de Gran Turismo sur Playstation ou les nombreuses vidéos (et sorties de route) sur youtube peuvent en attester.

 

Pour les besoins du film, Chris et Daniel ont réellement conduit, mais c’était des Formule 3 recarossées en F1,,,

 

Bref, le jour de course, il y a une réunion des pilotes. Vu l’évolution des performances des voitures, un tracé très dangereux ayant coûté la vie à de nombreux pilotes et une météo défavorable, Lauda propose d’annuler la course, car les risques sont trop grands. Hunt l’accuse de faire cela pour conserver son avance au championnat, un vote entre pilotes à lieu et la majorité décide de disputer la course.

 

Sans le courage de 4 autres pilotes, Niki Lauda n’aurait pas survécu…

Lors du départ, Hunt et Lauda font un mauvais choix de pneus, et se font dépasser par des concurrents. Lauda change de pneus et entreprend de rattraper son retard, mais il perd le contrôle de sa Ferrari, qui vient violement heurter le rail de sécurité et sa voiture est projeté au milieu de la piste.

 

Sous la violence du choc, son casque est arraché et la voiture prend feu… avant que 2 autres monoplaces le percutent !!! Il restera plus d’une minute dans le brasier, et ne doit la vie sauve qu’aux 4 pilotes venus l’extraire de sa monoplace.

 

Vidéo de l’accident de Niki Lauda

 

Son état est si catastrophique qu’un prêtre pratique l’extrême onction : brûlures au troisième degré au visage et aux mains, 2 os cassés et il a inhalé des vapeurs toxiques qui ont brûlé ses poumons. Mais il survit ! Non seulement il survit, mais il fait tout pour se rétablir et quitter l’hôpital le plus vite possible, le temps que ses poumons soient nettoyés et qu’on lui transplante de la peau sur le visage… 2 semaines après l’accident !

 

Et c’est probablement là que Niki Lauda est entré dans la légende, car 6 semaines après un terrible accident qui a failli lui coûter la vie, alors que tout le monde pensait que sa carrière était terminée, il reprend la compétition au Grand-Prix d’Italie! Défiguré et au prix de terribles douleurs (ses cicatrices et brûlures au visage sont encore vives), il termine 4! Seulement 6 semaines plus tard !!! Son courage et sa détermination lui feront gagner le respect de tous et franchira même la sphère du sport automobile.

 

Pendant la convalescence de Lauda, Hunt a rattrapé son retard sur Lauda. Il y a 3 points d’écart entre Hunt et Lauda, le titre de champion du monde se jouera lors de la dernière course sur le circuit de Fuji, au Japon, sous un déluge de pluie. Pour connaître la suite de l’histoire, je vous invite à regarder le film.

 

 

 

 

 

 

 

Pour moi, Apollo 13 était le meilleur film de Ron Howard. Ca, c’était avant d’avoir vu Rush ! Rush est selon moi son meilleur film. Quand on pense à Ron Howard, on pense souvent à un réalisateur appliqué, mais sans audace… C’est vrai dans beaucoup de ses films, mais quand on regarde Rush, niveau réalisation, c’est la claque !

 

Les courses sont spectaculaires, mais restent réalistes…

La réalisation est maîtrisée de bout en bout, d’une rare efficacité, pleine de plans inédits, on est en pleine immersion lors des courses, c’est rythmé avec de l’action et de l’émotion. Pour la musique, c’est Hans Zimmer, donc aucune déception à ce niveau.

 

Magnifique, cette patine 70’s

La reconstitution des années 70 et de l’ambiance des courses automobiles à l’époque est parfaitement retranscrite, avec une patine purement 70’s, et comme pour Apollo 13, l’histoire est extrêmement proche de l’originale. N’oublions pas que sur le plateau, Ron Howard a pris comme consultants l’ancien chef mécanicien de James Hunt et Niki Lauda himself !

 

Mais le cœur du film, c’est bien entendu la rivalité entre Hunt et Lauda ! Pour incarner des pilotes aussi charismatiques, il fallait d’excellents acteurs… C’est le cas ! Chris Hemsworth est excellent dans le rôle de l’exubérant James Hunt, mais Daniel Brühl est encore un cran au-dessus !

 

En plus de porter des prothèses pour être plus ressemblant, il a cotoyé Niki Lauda sur le tournage et il a pu s’imprégner de sa gestuelle et même de son accent et sa façon de parler ! Du grand art…et il ne sera même pas nominé au Oscars pour son rôle (il a eu 4 titres pour son interprétation dans d’autres cérémonies, dont les Golden Globes). Chris Hemsworth et Daniel Brühl ont également tourné des scènes de courses, mais dans des formules 3 recarossées en F1, ces dernières étant trop « violentes » à conduire pour leur niveau.

 

Le casting est impeccable, avec les acteurs principaux ressemblants et excellents

 

Il y a plusieurs scènes fortes dans le film. Les courses bien sûr, mais également par exemple lorsque l’on doit nettoyer les poumons de Niki Lauda, je ne sais pas si cela a été truqué, mais on a mal pour lui. Tout comme lorsque il se force à remettre son casque et ses cris, car ses blessures au visage n’ont pas complètement cicatrisées. Ou James Hunt qui casse la figure à un journaliste qui demandait à Lauda si son mariage allait tenir alors qu’il est défiguré. Sans parler de leur dernière conversation qui est un grand moment.

 

Entre eux, malgré leur rivalité, on était loin de la haine entre Senna et Prost

Car malgré leur rivalité et le fait qu’ils étaient radicalement différents, Lauda et Hunt se respectaient (et étaient même amis dans la vraie vie). C’est le cœur et la force du film, faire un biopic sur 2 personnages fascinants et dont la F1 n’est pas le sujet principal. Et autre force, le film ne prend pas parti pour un pilote.

 

Au rayon bizarreries, durant la saison 1976-1977, la Tyrell avait effectivement… 6 roues!!!

A travers Rush, on peut revivre une période révolue, celle ou les F1 étaient des voitures très dangereuses avec des morts presque chaque année (les réservoirs d’essence étaient autour des pilotes !), où les arrêts au stand duraient une éternité et où les pilotes étaient encore accessibles. On sent que Ron Howard était impliqué et intéressé par son sujet et les personnages. Il a également eu la brillante idée de trouver des financements hors des Etats-Unis pour pouvoir réaliser le film qu’il voulait. Et visiblement, il avait raison, puisque le film a rapporté 2,5x son investissement !

 

Stallone a de quoi être dépité. Au lieu d’un biopic très prometteur sur Senna, les studios ont massacré le script, pour cette bouse appellée Driven

Quand je dis que Ron Howard a pu faire le film qu’il voulait, c’était pour éviter que les studios américains s’en mêlent. Vous voulez un exemple ? Au début des années 2000, Sylvester Stallone voulait réaliser un biopic sur Ayrton Senna. Stallone avait écrit le scénario, devait le réaliser et avait un petit rôle et  Antonio Banderas devait incarner Ayrton Senna. Mais, au moment du financement par les studios, patatras ! Fini le biopic sur Senna et la F1, on modifie complètement le script et le film se passera en IndyCar (F1 pas populaire aux USA), Sylvester Stallone devient le premier rôle, sensé coaché un jeune rookie. Et pour la réalisation ? Exit Stallone à la réalisation, on va mettre Renny Harlin. Le résultat ? Cette bouse de Driven, dont Stallone dira des années plus tard que c’est un des pires souvenirs de sa carrière. Heureusement, ce n’est pas le cas pour Rush.

 

Au fait, que son devenu les véritables James Hunt et Niki Lauda ? Pour James Hunt, il mettra un terme à sa carrière en 1979. Il aura un élevage de perroquets (!!!) et sera également consultant pour les Grands-Prix de F1 sur la BBC pendant 13 ans. Mais il continuera de brûler la vie par les 2 bouts, aura des soucis financiers dus à ses nombreuses pensions alimentaires et mourra d’une crise cardiaque en 1993 à l’âge de 45 ans.

 

Quant à Niki Lauda, il sera en tout couronné 3 fois champion du monde, la dernière en 1984. Il mettra un terme à sa carrière en 1985, (avec 2 années sabbatiques en 1980 et 1981). Il fonda 2 compagnies aériennes, Lauda Air et FlyNiki, qu’il revendit, commentateur de Grand-Prix de F1 de 1996 à 2011, puis, en 2011, suite à la vente de FlyNiki, il deviendra président non-exécutif de l’écurie Mercedes Grand Prix. Mais en 2017, après des décennies de lourds traitements médicamenteux qui auront nécessité 2 greffes, il doit recevoir une transplantation des poumons. Ma sa santé va continuer à se dégrader et le 20 mai 2019, Niki Lauda nous quitte à l’âge de 70 ans.

 

Merci Ron!

Ayant déjà chroniqué 2 films de Ron Howard, j’avais prévu de faire cette chronique plus tard, mais le récent décès de Niki Lauda m’a fait changer d’avis.

 

Pour résumer, je dirais que tout est réuni dans ce film pour un grand film ! Réalisation impeccable, spectaculaire et rythmé, émouvant, musique au top, acteurs excellents (mention spéciale pour Daniel Brühl), univers parfaitement retranscrit et surtout, une histoire géniale centrée sur les personnages et profondément humain, sans parti pris. Il a reçu 20 prix et plaît même à des personnes réfractaires à la F1. Merci Ron Howard, t’as assuré! Si vous ne l’avez pas vu, je vous conseille vivement Rush, qui fait partie de mon top 20, tous styles confondus !!!

 

Hidalgo

 

Extraits vidéos :

Bande-annonce (fr)

Extrait: course (vost)

Mini-reportage de 3 mins de Ron Howard à propos de Rush (sous-titres en français)

 

Rush

 

Sortie:                                     2013

Durée:                                    122 minutes

Genre:                                    Drame – histoire vraie

 

Pays:                                      USA/Royaume-Uni/France

 

Réalisation :                           Ron Howard

Production :                            Andrew Eaton, Eric Fellner, Brian Grazer, Ron Howard et Brian Oliver

Distribution :                           Universal Pictures (USA), StudioCanal (Royaume-Uni), Pathé Distribution (France)

Scénario :                               Peter Morgan

 

Acteurs principaux:                Chris Hemsworth (James Hunt), Daniel Brühl (Niki Lauda), Olivia Wilde (Suzy Miller), Alexandra Maria Lara (Marlene Lauda), Pierfrancesco Favino (Clay Regazzoni)

 

Budget :                                  38’000’000 $

Recettes mondiales:               98’200’000 $

 

 

Récompenses : le film reçu 20 prix, dont 2 Golden globes. Les oscars n’ont même pas nominés Daniel Brühl, une honte ! Voici le palmarès :

 

Washington D.C. Area Film Critics Association Awards 2013 :

Meilleur acteur dans un second rôle pour Daniel Brühl

Meilleur montage

 

British Academy Film Awards 2014 :

Meilleur film britannique

Meilleur acteur dans un second rôle pour Daniel Brühl

Meilleur son

 

Critics’ Choice Movie Awards 2014 :

Meilleur acteur dans un second rôle pour Daniel Brühl

Meilleur maquillage

Meilleur montage

Meilleur film d’action

 

Golden Globes 2014 :

Meilleur film dramatique

Meilleur acteur dans un second rôle pour Daniel Brühl

 

Satellite Awards 2014 :

Meilleur réalisateur pour Ron Howard

Meilleure direction artistique

Meilleurs costumes

Meilleure photographie

Meilleur montage

Meilleur son

Meilleurs effets visuels

 

Screen Actors Guild Awards 2014 :

Meilleur acteur dans un second rôle pour Daniel Brühl

Meilleure équipe de cascadeurs

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